dimanche 17 avril 2011

Journée Découverte de la Plongée Souterraine Haute-Savoie
Plongée trimix -60m au Goul du Pont


C'est reparti pour deux nouvelles journées découverte de la Plongée Sout' à BSA (Bourg St Andéol). Celles-ci sont organisées à l'initiative du CoDep 74 et donc sous la férule de Laurent Bron. Malheureusement celui-ci n'a eu que peu d'inscriptions,  alors même que les précédentes -- qui avaient dues être annulées du fait de conditions défavorables -- avaient pourtant été très demandées. Visiblement le report ne s'est pas fait... Qu'importe, Michel Conte du CoDep 26/07 et moi-même pour le CoDep 69 trouvons de quoi compléter. Plus quelques inscriptions tardives en 74, le stage peut démarrer.


Samedi 16 avril

Lendemain de soirée oblige, j'ai un peu la tête dans le seau et le démarrage est laborieux. De plus je découvre (!) que c'est jour de départ en vacances, cumulé avec avec un we annoncé "grand beau"... La vitesse est limitée à 110 pour la régulation et j'appelle donc Babar pour l'informer d'un léger retard. La régulation semble efficace et malgré une circulation chargée je ne rencontre pas de bouchons jusqu'à la sortie de Montélimar Sud. J'arrive avec finalement peu de retard et m'insère dans le briefing avec une présentation express.

 Le programme habituel se déroule. Après le brief global sur la journée par Babar (responsable technique) et Michel (responsable administratif), on se répartit les différentes présentations : Michel expose -- avec force très belles photos et les topos qui vont bien -- les spécificités de chacun des Gouls, Babar présente l'activité au sein de la fédé (et de la FFS) et notamment les récents niveaux propres à la FFESSM, pour ma part je présente le matériel et le fil avec surtout leur bonne utilisation. Le matériel ayant été présenté il est l'heure de passer aux travaux pratiques : armés du contenu de la malle pédagogique de la commission régionale RABA, de notre propre matos et surtout d'un savoir-faire impressionnant B) , nous assistons les stagiaires pour leur construire une configuration adaptée en partant de leur propre gilet de stabilisation. Utiliser autant que possible leur gilet limite beaucoup la perturbation de nos adaptations. Les bi 7.5 litres de la commission étant étroits la plupart des sangles de stab classiques suffisent à les fixer, avec une sangle supplémentaire pour stabiliser le bas des blocs. Quand leur détendeurs sont en DIN on les conserve aussi, mais nous ajoutons généralement un détendeur monté en configuration "gauche". Au final je leur fait remarquer que la deuxième bouteille dans le dos se fait complètement oublier, qu'ils ont déjà l'habitude d'avoir 2 détendeurs, et donc qu'ils ont seulement un manomètre supplémentaire à gérer. Le vrai changement matériel est plutôt dans l'agencement compact adopté, car il vrai que la compacité est rarement une préoccupation majeure du plongeur mer... Les mousquetons, caouèches et colliers rislan sont de tous les combats et petit à petit tout le monde se trouve équipé.

L'heure du repas arrive et on se retrouve bien sûr au soleil et allongés dans l'herbe. L'organisation n'étant pas signée Michel il fallait cette semaine penser à son pique-nique. Le mien se présente basiquement sous forme de conserves, mais heureusement Josée faisant une expédition à la boulangerie je lui passe commande d'une pizza pour agrémenter. L'intermède gastronomique est important pour placer un vrai moment de détente (même si ces journées sont toujours très calmes et détendues) avant la plongée elle-même.

Aujourd'hui, comme j'ai prévu en fin de journée d'effectuer une plongée trimix pour me préparer à mon prochain stage, Laurent ne m'a affecté qu'un seul stagiaire. Sylvain est un grand gaillard stéphanois, presque un voisin donc. Il se montre attentif au briefing d'avant plongée, et consciencieux avec les vérifications dans la vasque. La configuration du Goul du Pont étant généralement source de baptêmes un peu trop courts, j'ai pris les devants en lui disant de prendre son temps et de ne pas hésiter à s'arrêter pour regarder ce qu'il veut. De niphargus en bulles d'air collées au plafond nous arrivons tranquilement au puits. Comme il est très respectueux des consignes je le fais descendre à la limite d'évolution autorisée (-20m) et lui fait signe de rester la main sur la corde. Je descends de quelques mètres, afin de mieux lui éclairer le puits et donner cette vision particulière quand un plongeur évolue plus bas. Sur le chemin du retour, la galerie s'y prêtant bien et histoire d'occuper un peu, je lui fais une démonstration de spider-chochon avant de le faire essayer à son tour ! Sur le dos, et le gilet gonflé à bloc, on marche à quatre-pattes au plafond... Ayant repris une attitude plus digne pour croiser une autre équipe, nous ressortons dans la vasque après environ 25' de plongée. Sylvain à la banane, satisfait des nouvelles sensations expérimentées et des visions de cet univers minéral si particulier.

Après un rapide debrief -- timing serré -- je prépare ma configuration pour faire ma plongée trimix. Je me suis muni d'un bi 10L d'héliair 16/25 et de 2 relais 9L air pour aller au puits et faire la déco. L'héliair n'était pas forcément le mélange le plus parfait mais la personne (nouvelle) chargée de faire les mélanges chez le seul gonfleur trimix de Lyon n'étant pas encore très à l'aise, je me suis dit que la simplicité était préférable. De plus il n'est hypoxique que très proche de la surface (à une profondeur à laquelle j'aurai terminé mes paliers) et me donne un équivalent narcotique air de -35m quand je serai à -60m. J'ai longuement préparé mes runtimes à l'aide de MvPlan (1) et reporté ceux-ci au marqueurs sur un scotch large collé au tuyau de manomètre de mon dorsal. J'ai prévu un dépassement en temps et un dépassement de profondeur, tout est prêt.

Je "chausse" mon bi à l'extérieur en utilisant un muret serviable, puis me mets à l'eau pour récupérer mes relais que j'ai immergés au pied du mur de la vasque. Je clampe les blocs, vérifie les manos, l'accessibilité de tout le matériel, mes lampes et mes détendeurs, puis m'immerge enfin. L'étroiture malgré les 4 bouteilles ne pose pas de problème. Dans la galerie je m'équilibre, refait une vérification rapide et me dirige vers le puits. J'ai prévu de faire tout le puits au trimix et dépose donc mes deux relais sur le fil, au bord du puits à -18m. J'entame la descente plus léger. Passage de la marche à -30m, puis de la limite des -50 que l'on respecte en plongée à l'air, et j'atteins rapidement par ressauts successifs la pseudo-étroiture à -59m. Son passage est une formalité et je débouche dans la petite salle caractéristique. La galerie repart sur la gauche en descendant, avec un profil plus vertical. Pour aujourd'hui, respect de l'objectif oblige, ce sera mon terminus. Je me contente de m'approcher un peu pour éclairer la suite, mon timer affiche -63m. Je remonte un peu et fait un tour d'horizon pour observer la salle puis repasse l'étroiture et amorce tranquillement la remontée. J'ai forcé dans mon profil un court palier à -30m pour l'hélium. En tout, décompression comprise, ma plongée n'aura duré que 40 minutes.

Quand je sors tout le monde est encore là et je peux même participer au débrief général de la journée. Tout le monde plie bagage et j'emboîte la roue de Babar pour rejoindre le gîte. La chambre est spacieuse avec un lit double et coin salon en bas, une large mezzanine avec deux lits simples au-dessus. Dessous, accessible par un escalier étroit se trouvent les toilettes et la salle de bain. La pièce principale donne sur les champs. Un vrai havre de paix. Après la douche nous repartons pour BSA, rejoindre nos amis Xavier et Michel pour un excellent repas à petit prix à La Marmite.


Dimanche 17 avril

Une bonne nuit de sommeil et nous sommes prêts pour le deuxième tour. Histoire de bien commencer la journée nous rejoignons la salle à manger. Elle est vaste et superbe, à l'ancienne, avec une grande table dressée avec goût. Le propriétaire, vieille connaissance des Babars prends nos commandes et fais la conversation. Le pain est à l'image du décor : rustique et savoureux, les confitures maison font tomber mes résolutions de tempérance, quant au gâteau aux noix... C'est le meilleur que j'ai jamais mangé ! Je n'arrive même pas à cacher ma gourmandise... Ainsi repus nous rejoignons les Gouls de Tourne pour accueillir les nouveaux stagiaires.

Cette journée m'est particulièrement agréable, puisque j'accueille à nouveau des amis de mon club pour leur faire découvrir notre jardin souterrain. Il s'agit cette fois de Simon Pélerin et Gilles Demeulenaere. Dès leur arrivée Simon laissant libre cours à sa nature expansive et gauloise se fait vite adopter, de même que Gilles plus en retenue et à l'humour subtil. Petit à petit tout le monde est là et nous recommençons les habituels briefings et exposés, agencement des scaphandres. Bien sûr je m'occupe de mes camarades et -- Simon ayant pris moults renseignements -- nous visiterons la Tannerie, objet de ses fantasmes. Surtout il ne veux pas connaître la frustration de Daniel devant le puits interdit. Bien sûr nous cassons d'abord la croûte... "Encooore ?" dirait Babar ! 

Je commence avec Simon, impatient. Le passage de l'entrée se fait sans appréhension et nous avançons sereinement  le long de la cablette. Cette semaine le niveau plus bas nous épargne le courant, facilitant la progression. Tout fou qu'il soit Simon est un bon plongeur, respectueux des consignes. J'observe son positionnement par rapport au fil, ses premiers changements de détendeur. Tout est ok, je peux lui laisser un peu de champ. J'ai récupéré son phare et virevolte autour de lui pour lui éclairer au mieux la galerie. Je tiens à lui montrer ses plus beaux atours ! Son regard dans le masque est éloquant, il a la banane et les yeux gourmands. Gourmand est peu dire quand je lui montre les niphargus : je sens bien qu'il pense à la mayonnaise ! Je lui fais la totale, ne négligeant aucun point d'intérêt. La première cloche au-dessus de la marmite emplie de galets, la seconde sous pression (-2m) à 70m de l'entrée, le canyon dans lequel je me déplace en éclairagiste consciencieux... La vérification des pressions donne le visa pour passer la seconde étroiture, plus serrée que celle d'entrée. A 150m je lui montre l'étiquette de distance sur le fil. Néanmoins je lui fais signe de ne pas faire demi-tour et lui montre tout contre un rilsan vert sur le cable, et surtout le départ de fil que ça indique. Par précaution je me mets au-dessus du fil à l'endroit touilleux et lui indique de rester à ma gauche. Un instant plus tard nous surplombons le petit puits que j'éclaire de mon mieux.
Il est temps de rentrer et je le guide vers la sortie. Juste une méfiance dûe à une renommée particulière pour ses capacités d'orientation... :D   Juste avant de repasser l'étroiture je lui montre les cristaux de la géode, et lui indique de passer le premier. Dans ce sens il coince un peu, naturellement poussé à relever la tête vers la suite de la galerie qui remonte, alors qu'il vaudrait mieux mettre le nez dans les cailloux. Je me faufile à côté de lui et appuie sur les protections de robinetterie qui se bloquent sur les aspérités de la voute. Plop, c'est passé. Sortis du canyon je lui montre le chemin de la cloche qui le surplombe. Celle-ci, à l'air libre et recevant d'importants ruissellements, est riche en concrétions diverses vraiment belles. Le retour vers la sortie se fait toujours à un train de sénateur, Simon ne voulant pas en perdre une miette. Nous marquons une pause à 30m de l'entrée pour que je lui éclaire la galerie remontante en rive gauche. C'est aussi mon point de repère pour l'extinction des feux. Aussitôt l'obscurité faite le halo ténu du jour se révèle, subtil et rassurant. Nous sortons ainsi, la lumière croissant comme nous quittons le lit souterrain de la rivière. Quarante minutes de baptême, qui dit mieux ?! En surface Simon expose d'une voix douce sa satisfaction. Mais non, bien sûr ! Il brâme d'une voie forte et joyeuse que "C'est excellent !" et que les niphargus "C'est trop fort !", et plein d'autres choses. Il a aimé.

Gilles prend le relai, sans plus d'anxiété. Le calme est sa nature. La curiosité aussi, et je m'efforce de la satisfaire en lui proposant un programme identique. Pour lui aussi "les yeux du masque" expriment clairement le plaisir. Quand on sort 35 minutes plus tard, ce qui est aussi une belle plongée découverte, sa satisfaction s'exprime plus calmement. Mais ses yeux brillants et son large sourire indiquent une satisfaction égale, même si moins bruyante.

C'est le moment de ma deuxième plongée trimix du week-end. J'avais initialement prévu aujourd'hui une plongée profonde à la Tannerie en tout début de journée, avant les stagiaires. Mais la discussion de la veille m'a fait changer mon objectif. Si Babar, connaissant ma petite consommation -- quoique énorme par rapport à la sienne -- semblait confiant dans la possibilité de rallier le puits  à 700 m sur mes seuls relais 9L, Xavier était plus circonspect. Une réserve sur deux me suffit à changer mes plans. Non pas qu'il y ait un risque de sécurité. Le risque c'est, si j'ai vu trop juste, de ne pas pouvoir faire la plongée faute de pouvoir passer sur le dorsal, car progresser près de la surface (au bout de la galerie on est seulement à -5m) avec un mélange proche de l'hypoxique ne serait pas un bon plan... Je vais donc refaire la même plongée que la veille. Repartant sur le même bi sans avoir pu regonfler, je réévalue ma règle des quarts, ce qui me laisse encore de quoi faire. Je ferai au final une plongée à -59m, m'arrêtant juste avant le passage bas, et d'une durée totale de 36 minutes.

En ressortant mes amis m'accueillent et me donne la main pour remonter le matos à la voiture. Nous papotons encore un peu et ils prennent le chemin du retour. Nous avons encore du rangement et du gonflage à faire, recharger la remorque. Nous pouvons enfin nous eclipser à notre tour, laissant Michel verrouiller la borne derrière nous.



Les photos sont de ...
1 : Fiche cavité sur le site FFESSM-CNPS
    Fiche cavité sur le site de PlongéeSout





Un autre point de vue, concis lui !

Compte-rendu de Gilles

Nous avons bénéficié d’une météo exceptionnelle pour visiter ces sources plus limpides qu’un lagon polynésien ! Et d’un encadrement de qualité, qui nous a mis en confiance pour cette découverte du monde souterrain qu’ils connaissent mieux que leur poche. Le temps nécessaire d’explications et d’équipement se passe en plein air dans un très beau cadre, entre les deux vasques, sous le regard du dieu Mithra (dieu de la fécondité d’origine iranienne). Ce dernier serait né de la roche, dans une grotte, et dans l’antiquité ses sanctuaires étaient appelés speleaum...

Ce qui m’a plu c’est la beauté de la texture et des formes de la roche, sculptée par l’eau, les veines, cristaux, concrétions… Même si la voûte n’est pas très haute, les nombreux petits canyons, puits et bifurcations nous laissent entrevoir les immenses possibilités d’émerveillement suivant le fil des explorateurs du centre de la terre.

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